Le Droit du C.E.

1. Le CE et les institutions représentatives du personnel
Le Comité d’Entreprise constitue, avec les Délégués du personnel, l’une des deux formes de représentation directe du personnel dans les entreprises de droit privé. Les règles qui président à son fonctionnement et à ses missions relèvent du droit du travail.
La désignation des institutions représentatives
du personnel repose sur le principe du monopole syndical,
lequel s’exerce au bénéfice des seuls
syndicats représentatifs.
Dans les entreprises privées, ce monopole est relatif.
En l’absence de quorum (50% des inscrits ayant voté
au 1° tour), un second tour est organisé, au cours
duquel des candidatures libres sont admises.
Les différentes formes de représentation du
personnel entretiennent entre elles des liens complexes et
variés. En effet, leurs compétences se chevauchent
et un même salarié peut par ailleurs cumuler
tous les mandats. Des règles précises organisent
leurs rapports et délimitent leurs domaines de compétences
respectifs.
b) Rôle des syndicats et de leurs représentants
Une section syndicale peut être créée
dans toute entreprise. La désignation du délégué
syndical doit être faite par l’intermédiaire
d’un syndicat représentatif.
Les syndicats ont une double fonction, revendicatrice et paritaire
:
- représentation des salariés dans les structures
paritaires : négociation des accords de branche et
des conventions collectives, gestion de la Sécurité
Sociale, des Mutuelles, de la Médecine du Travail,
des Tribunaux de Prud’hommes, du Conseil Economique
et Social, etc.
- revendications relatives aux salaires et aux conditions
de travail.
Les syndicats sont obligatoirement représentés
au Comité d’Entreprise.
L’institution des Délégués du
Personnel est, après les syndicats, la plus ancienne
forme de représentation du personnel. Elle date de
1936 et concerne toutes les entreprises de plus de 10 salariés.
Les DP sont élus directement par les salariés
et disposent d’un crédit de 15 heures par mois.
Leur fonction consiste à transmettre les réclamations
individuelles ou collectives des employés. Elles sont
remises à l’employeur par écrit, lors
de réunions mensuelles et consignées dans un
registre tenu à la disposition du personnel, avec les
réponses de la direction.
En l’absence de comité, les attributions économiques
du CE peuvent être exercées par les délégués
du personnel. Les DP forment par ailleurs avec les élus
du CE le collège électoral chargé de
procéder à la désignation du CHSCT.
Le CHSCT s’apparente aux commissions obligatoires issues
du CE. Institué en 1982, les règles qui régissent
son fonctionnement sont d’ailleurs quasiment identiques
à celles du Comité.
Son rôle consiste à veiller au respect de la
réglementation relative à l’hygiène,
la sécurité et les conditions de travail. Il
n’existe que dans les entreprises de plus de 50 salariés.
Ses membres disposent d’un crédit d’heures
fixé en fonction des effectifs de l’établissement.
Le CE doit être informé de ses décisions,
notamment en ce qui concerne les opinions ou prescriptions
émises lors de ses différentes consultations
obligatoires. Le CE peut par ailleurs être lui même
amené à consulter le CHSCT. En l’absence
de CHSCT, son rôle est dévolu aux DP.
e) La délégation unique du personnel
La Délégation Unique du Personnel a été
instaurée par la loi Madelin,
adoptée le 20.12.1993 et transcrite dans les articles
L. 2322-1 et suivants et L. 2314-1 du Code du Travail. Elle donne aux chefs d’entreprises
de 50 à 199 salariés, la faculté de décider
que les délégués du personnel constituent
la délégation du personnel au comité
d’entreprise. Il s'agit donc de faire exercer les missions
des DP et du CE par les mêmes élus, les
deux institutions conservant par ailleurs l'intégralité
de leurs attributions.
Le nombre de délégués est fixé
selon l'effectif de l'entreprise :
Effectif de l’entreprise | Nombre de délégués |
50 à 74 | 3 titulaires / 3 suppléants |
75 à 99 | 4 titulaires / 4 suppléants |
100 à 124 | 5 titulaires / 5 suppléants |
125 à 149 | 6 titulaires / 6 suppléants |
150 à 174 | 7 titulaires / 7 suppléants |
175 à 199 | 8 titulaires / 8 suppléants |
2. Les différentes formes de comités
a) La nature juridique de la société
La loi module l’obligation de constitution des Comités d’Entreprises en fonction de la nature juridique de la société. Dans le cas des sociétés comportant plusieurs établissements, elle prévoit ainsi la constitution de plusieurs types de comités : comité d’établissement (le CE), comité central d’entreprise (le CCE), comité de groupe (CG) et pour les sociétés multinationales un comité européen d’entreprise CEU).
b) Comités d’entreprise et d’établissement
Le Comité d’Entreprise est la règle dans
les sociétés ne comprenant qu’un seul
établissement, dès lors que celui-ci occupe
au moins 50 salariés. Toutefois, la notion sociale
d’établissement ne correspond pas obligatoirement
à celle d’établissement au sens administratif
du terme. Les personnels d’une même entreprise
peuvent ainsi être regroupés dans un seul établissement.
Dans un tel cas de figure, la fixation du nombre d’établissements
distincts se fait par un accord entre le Chef d’Entreprise
et les Syndicats, ou en cas de désaccord par la DDTE
du siège. Chaque établissement comportant plus
de 50 salariés disposera d’un Comité dit
comité d’établissement.
c) Le comité central d’entreprise
Réf. Art L. 2327-1 et suivants
Dès lors qu’existent plusieurs comités
d’établissement, il doit être créé
un comité central d’entreprise Il est désigné
par les titulaires des comités d’établissement
parmi leurs membres, dans la limite de 2 représentants
(1 titulaire et un suppléant par entreprise. L’articleL. 2327-17du Code de travail précise qu’il ne peut
y avoir à ce titre plus de 15 titulaires et un nombre
égal de suppléants. Ces chiffres peuvent
toutefois être dépassé en cas d’accord
d’entreprise ou par le biais d’une convention
collective.
Chaque syndicat désigne aussi un représentant.
Dans les entreprises de moins de 300 salariés, le DS
est membre de droit. (Art L. 2143-22)
L’article L. 2327-2 définit
les modalités de la répartition des compétences
respectives des CE et CCE sur la base d’un accord entre
chef d’entreprise et syndicats. Les missions du CCE
relèvent essentiellement des attributions économiques
qui concernent la marche générale de l’entreprise
et excèdent les limites des pouvoirs des chefs d’établissements.
Elles comportent notamment leur information et leur consultation
sur les projets économiques et financiers importants.
Les Comités d’Etablissement peuvent aussi déléguer
au CCE la gestion d’activités sociales et culturelles
communes.
Les réunions du CCE doivent avoir lieu au moins tous
les 6 mois au siège de la société. Elles
sont convoquées par le Président. Leur ordre
du jour est établi par le Président et le Secrétaire.
Une réunion exceptionnelle peut être convoquée
par la majorité des membres, comme pour les CE. Le
PV est de même rédigé par le Secrétaire
Le CCE n’a pas de budget propre, sauf accord, mais il
y a obligation de mise à disposition par la société
des moyens nécessaires à son fonctionnement.
(Article L. 2327-3 et suivants).
Depuis la loi du 28 octobre 1982, l’article L. 2331-6 du code du travail prévoit la création
d’un comité « au sein du groupe formé
par une société dominante, les filiales de celle-ci
et les sociétés dont la société
dominante détient indirectement plus de la moitié
du capital et dont le siège social est situé
sur le territoire français. »
Le Comité de Groupe est composé du Chef d’Entreprise,
lequel peut se faire accompagner de deux assistants, et des
délégués du personnel au nombre de 2
par entreprise (1 titulaire et 1 suppléant), leur nombre
ne pouvant être supérieur à 30 ( ?). Les
délégués sont désignés
par les syndicats parmi les membres élus des différents
CE.
Sa compétence se limite au domaine de l’information.
Cf. Article L. 2332-1 :’’
Le comité de groupe reçoit des informations
sur l’activité, la situation financière
et l’évolution de l’emploi dans chacune
des entreprises qui le composent. Il reçoit communication,
lorsqu’ils existent des comptes et du bilan consolidé
ainsi que du rapport du commissaire aux comptes correspondant.’’
Il doit aussi être informé en cas d’OPE
ou OPA, et peut demander dans ce cas à entendre l’initiateur
de l’offre et se faire assister d’un expert comptable,
rémunéré par l’entreprise dominante.
La fréquence des réunions est annuelle. Les
délégués ne bénéficient
pas de crédit d’heure particulier pour l’exercice
de leur mission et le comité ne dispose pas de budget
spécifique, sauf accord plus favorable.
e) Le comité d'entreprise européen
Art L. 2341-4
Il concerne les sociétés employant plus de
1000 salariés et comportant des établissements
de plus de 150 salariés dans au moins 2 états
européens (effectifs calculés sur les 2 dernières
années). Sa mise en place peut entraîner la suppression
ou l’aménagement du Comité de Groupe.
(Art L. 2332-1).
Sa réunion est annuelle, des réunions motivées
par l’urgence pouvant être convoquées en
cas de délocalisation ou de fermeture. Les réunions
sont consacrées à son information ou à
sa consultation au niveau communautaire.
Les sociétés dont le siège est à
l’étranger relèvent de la loi sur les
comités d’entreprises uniquement pour leurs établissements
situés en France. Ce principe peut donc se heurter
à des difficultés, notamment dans le domaine
économique à propos de la transmission d’informations
économiques sur le groupe.
La Confédération Européenne des Syndicats
(CES) organise les négociations relatives à
la mise en place d’un CEU. En cas de désaccord,
il existe des règles subsidiaires conduisant à
son imposition (L. 2346-1 et L. 2432-1)
3. Elections
et renouvellement du CE
Les comités d’entreprise ont été rendus obligatoires par l’ordonnance du 22.12.1945, qui concerne toutes les entreprises d’au moins 50 salariés installées dans l’ensemble du territoire français, y compris les départements d’Outre-Mer (Article L. 2322-1). Il s’agit d’une obligation de moyens et non de résultats, le Chef d’Entreprise étant seulement tenu de mettre en place les moyens nécessaires à l’élection de délégués. L’absence ou l’insuffisance de candidatures entraîne un PV de carence transmis à l’Inspection du Travail qui le fait suivre aux syndicats du Département.
b) Mode de calcul des effectifs
Art L. 2322-1
La mise en place d’un CE est obligatoire si l’effectif
d’au moins 50 salariés est atteint ‘’pendant
12 mois consécutifs ou non, au cours des 3 années
précédentes ’’. On se reportera
au Registre Unique du personnel et aux tableaux mensuels des
effectifs en ce qui concerne :
-
Les salariés sous contrat à durée
indéterminée, y compris ceux travaillant
à domicile et les travailleurs handicapés.
- Les
salariés sous contrat à durée déterminée,
les travailleurs mis à la disposition de l’entreprise
par une société extérieure ou les salariés
temporaires, au prorata de leur temps de présence
dans l’entreprise.
- Les
salariés à temps partiel dont la
durée du travail est égale ou supérieure
à 20 heures par semaine ou à 85 heures par
mois.
- Les intérimaires embauchés suite à un surcroît de travail, à l’exclusion de ceux qui remplacent un salarié absent ou en congé.
Cas des travailleurs mis à disposition. La prise en compte des travailleurs mis à disposition par une entreprise extérieure dans le calcul de l'effectif de l'entreprise d'accueil est expressément prévue par le Code du travail : dès lors qu'ils participent au processus de travail de l’entreprise qui les occupe, les travailleurs mis à la disposition par une entreprise extérieure peuvent entrer dans le calcul de l’effectif (C. trav., art. L. 2311-1 et L. 2322-6).
c) Electeurs et conditions d’éligibilité
Sont électeurs les salariés de toute nationalité âgés d’au moins 16 ans et ayant trois mois d'ancienneté. Ils ne doivent cependant avoir encouru aucune condamnation privative du droit de vote politique.
Sont éligibles les salariés :
- ayant 18 ans résolus
- travaillant dans l’entreprise sans interruption depuis
un an au moins.
- n’ayant pas de lien de parenté avec l’employeur.
- n’ayant pas été condamné pour
indignité nationale ou déchu de leurs fonctions
syndicales (article L.2324-15)
d) Protocole d’accord pré-électoral
L’initiative d’organiser les élections,
qu’il s’agisse d’un renouvellement ou d’une
constitution, revient à l’employeur. Si celui-ci
n’agit pas, la consultation peut être mise en
place par une organisation syndicale ou un employé.
L'employeur doit inviter les syndicats à établir
leur liste et à négocier le protocole d'accord
préélectoral, qui sera transmis à l'inspection
du travail. L’ensemble des organisations syndicales
représentatives au plan national doivent être
invitées à cette négociation, même
si elles n’ont aucun adhérent dans l'entreprise
(cass. soc. 4 février 1997, BC V no 50).
Le protocole est signé par l'employeur ou ses représentants,
et par un salarié de l'entreprise mandaté par
un syndicat représentatif. La négociation peut
aussi être menée par le représentant d'un
syndicat extérieur à l'entreprise, donc n'appartenant
pas à son personnel (cass. soc. 21 juillet 1986, BC
V n' 412).
Contenu du protocole :
- il fixe les modalités d'organisation et de déroulement
des opérations électorales (date, heure, lieu
du scrutin, nombre des bureaux de vote, vote par correspondance,
forme des bulletins de vote, etc.). Il peut également
fixer la façon dont sera composé le bureau de
vote et prévoir la présence de représentants
des syndicats extérieurs à l’entreprise.
- il prévoit la répartition du personnel dans
les collèges électoraux et la répartition
des sièges entre les catégories de personnel.
Il peut éventuellement augmenter le nombre des sièges
à pourvoir et modifier le nombre de collèges,
mais seulement dans un sens plus favorable.
A l'occasion de l'élaboration du protocole d'accord
préélectoral, les organisations syndicales doivent
également examiner les voies et moyens en vue d'atteindre
une représentation équilibrée des femmes
et des hommes sur les listes de candidatures aux élections
professionnelles.
Détermination des collèges électoraux
A moins qu’une convention ou un accord collectif en
dispose autrement, la législation prévoit l’existence
de deux collèges :
- ouvriers et employés (1er collège),
- ingénieurs, chefs de service, techniciens, agents
de maîtrise et assimilés (2nd collège).
L’article L. 2327-3 prévoit aussi la constitution
d’un 3° collège dans les entreprises groupant
plus de 500 salariés, lorsque le nombre des ingénieurs,
chefs de service et cadres atteint ou dépasse le nombre
de 25. Cette catégorie doit alors avoir au moins un
délégué titulaire au CE.
Constat de l'accord.
L'accord n'est valable que s'il a obtenu l'assentiment de
toutes les organisations syndicales représentatives
existant dans l'entreprise, qu'elles l'aient entériné
ensemble ou séparément. Des élections
ne peuvent avoir lieu selon un protocole d'accord non unanime,
dont la validité est contestée devant le juge
d'instance (cass. soc. 3 février 1998, n' 535 P).
L'employeur établit et publie la liste des électeurs.
Si aucune liste n'est constituée, il rédige
un procès-verbal de carence qui est transmis à
l'inspection du travail. Il assume aussi la préparation
matérielle du scrutin.
Le 1° tour doit se tenir dans la quinzaine qui précède
l’expiration du précédent mandat. L'employeur
est tenu d’informer le personnel par voie d'affichage,
de l'organisation des élections Cet affichage doit
indiquer la date prévue pour le 1er tour, fixée
au plus tard dans les 45 jours suivant l'affichage.
Le vote a lieu au scrutin secret et comprend donc urnes, bulletins,
enveloppes anonymes et isoloirs (le Code du Travail précise
que les toilettes peuvent être employées à
cet effet).
Il s'agit d'un scrutin de liste à deux tours avec représentation
proportionnelle à la plus forte moyenne. Il est séparé
pour les titulaires et les suppléants.
Le premier tour est réservé aux listes
présentées par des syndicats représentatifs.
Un second tour a lieu, dans les 15 jours qui suivent,
si :
- il y a carence de candidats au premier tour,
- le nombre des suffrages exprimés n'atteint pas le
quorum fixé à la moitié du nombre d'électeurs
inscrits,
- tous les sièges n'ont pas été pourvus.
1. Le CE et les institutions représentatives du personnel
2. Les différentes formes
de comités
- a) La nature juridique de la société
- b) Comités d’entreprise et d’établissement
- c) Le comité central d’entreprise
- d) Le comité de groupe
- e) Le comité d’entreprise européen
3. Elections
et renouvellement du CE